En attendant « Grand’eau »
Ce pourrait être la raison invoquée pour ces deux semaines de retard à vous proposer en accès libre la version intégrale des News de mars. Mais cet argument tombe à l’eau car, lors de la réservation de nos vacances, nous ne savions que nous allions tomber en plein dans la soi-disante « spectaculaire marée du siècle »: Même pas un clapotis sur cette plage du Cotentin. Mais suffisamment d’occupation pour me distraire de l’obligation que je m’étais créée : livrer l’intégralité des News dès la parution d’une sélection (*) sur la revue Supply Chain Magazine. Mea culpa avec l’espoir que vous me pardonnerez cet écart. Parlant de « Grand’ eau » pourquoi ne pas aller admirer celles du Château de Versailles qui, elles, restent fidèles à leur réputation.
(*): Vous avez déjà pu lire les News précédées d’un * dans SCMag de mars 2015
* 82% Return logistics : un retour payant ?
Une intéressante étude conduite par UPS nous donne quelques chiffres qui viennent confirmer ou plutôt renforcer ce que notre bon sens nous laissait penser. Les acheteurs en ligne accordent une très grande importance à la politique choisie par l’e-commerçant pour la gestion des retours. C’est ainsi que 82% d’entre eux vont probablement finaliser leur achat s’ils savent qu’ils pourront retourner gratuitement un produit qui ne leur convient pas « no question asked » ou le déposer dans un point relais. En revanche, ils ne seront que 20% à le finaliser s’ils doivent le retourner à leurs frais. Alors, un retour coûteux ? Ou plutôt un retour gagnant si l’on se rappelle que, face à une offre foisonnante, la fidélisation du client est l’une des plus grandes richesses de l’e-commerçant. Pour celui-ci, il peut être bon de rappeler les attentes des acheteurs en ligne :
- 100% d’entre eux se satisfont d’une livraison sous 48 heures, mais ils sont encore 97% à accepter 3 jours et même 91% pourront attendre 4 jours. Corollaire logique : 90% attendraient un jour de plus pour bénéficier d’une gratuité de la livraison.
- 72% (seulement ?) veulent connaître la date de livraison prévue.
- Environ les deux tiers veulent pouvoir choisir entre plusieurs modes de paiement et de livraison.
- 63% d’entre eux s’attendent à une livraison gratuite et 62% veulent connaître l’état du stock avant de passer commande. Apparemment, ça ne leur suffit pas de savoir qu’ils seront livrés !
- 58% veulent pouvoir acheter tout simplement en tant qu’invités sans passer par de lourdes procédures d’inscription quelquefois illégales (par exemple la date de naissance) et inutiles lorsqu’il s’agit de l’achat d’un produit qui ne sera pas renouvelé.
Si ces attentes sont évidentes pour les acheteurs en ligne, pourquoi sont-elles si mal comprises et intégrées par trop d’e-commerçants dans leurs offres?
* 600 Côte ouest : la grève sur le tas ou des tas sur la grève ?
Après la fin de la grève perlée des dockers sur la Côte Ouest des Etats Unis qui restreignait fortement le déchargement des porte-conteneurs, le bilan est accablant : – 31 porte-conteneurs étaient en attente de déchargement dans les Ports de Los Angeles et Long Beach et une douzaine d’autres, en approche, devaient venir s’y ajouter. – Honda US annonçait que 6 de ses usines allaient devoir s’arrêter ou réduire leur activité. Il en est de même pour Toyota et Subaru, tandis que le syndicat de la boucherie annonçait perdre 70 millions de dollars par semaine et que les agriculteurs devaient jeter les pommes qu’ils ne pouvaient exporter. – les retards accumulés par ces grèves perlées ne seront pas récupérés avant trois mois pour les plus optimistes et jusqu’à 6 mois pour les pessimistes. – la compagnie coréenne Hangin Shipping Co a décidé de quitter définitivement le port de Portland. Ce ne sont pas moins de 600 dockers qui seront débarqués ou plutôt iront sur la Place de Grève (le premier lieu où les « dockers »se présentaient à l’embauche). – mais, les autres dockers, déjà les plus payés des cols bleus américains (jusqu’à $120 000 par an pour un docker confirmé) obtenaient une augmentation substantielle d’un dollar de l’heure de plus par an pour chacune des 5 prochaines années.
Heureusement ce n’est pas en France qu’une telle situation pourrait se produire.
* 1378 Quand les Chinois s’éveillent …
Il y a déjà plus de 40 ans, Alain PEYREFITTE publiait un livre prémonitoire « Quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera ». De fait, nous avons vu la Chine évoluer continuellement jusqu’à devenir, fin 2014, la première puissance mondiale pour la parité de pouvoir d’achat. C’est le résultat d’une action constante du gouvernement chinois qui a voulu favoriser la croissance à tout prix en s’appuyant sur une population ouvrière docile. Mais les temps changent et , bien que les syndicats libres soient interdits, les ouvriers, les institueurs, les dockers, se mettent en grève pour des causes diverses : faux contrats de travail, salaires insuffisants, heures supplémentaires non payées etc. Depuis leur victoire sur Honda en 2010, qui se traduisit par un augmentation de salaire de 32%, ils ont compris que sans, voire contre, l’accord du gouvernement, ils pouvaient faire bouger les lignes. En 2014, pas moins de 1378 grèves furent officiellement répertoriées. Plus du double de l’année précédente. Et même si la police va jusqu’à entrer dans les usines pour obliger les ouvriers à reprendre le travail, comme par exemple chez Artigas Clothing and Leatherware à Shenzen, la probabilité de voir les ouvriers courber l’échine est de plus en plus faible.
Quand les Chinois s’éveillent n’est-ce pas le gouvernement chinois qui tremble?
* 428000 Robots industriels : France réveille-toi !
C’est, Selon la Fédération Internationale de Robotique, le nombre de robots industriels que la Chine devrait avoir installésdans ses usines en 2017. Partant de 100 000 en 2013, elle en ajouterait près de 100 000 chaque année passant ainsi largement en tête de tous les pays. Il faut toutefois pondérer ce chiffre en le rapportant au nombre d’opérateurs et là, la Chine déchante. En effet avec 30 robots pour 10 000 opérateurs en 2017, elle sera très loin derrière la Corée du Sud (437), le Japon (323),l’Allemagne (282) et les Etats-Unis (152). Avec ses 125 robots par 10 000, la France peut-elle se flatter d’être à la onzième place ? Nous pouvons en douter surtout lorsque nous apprenons, par le Journal du Net, qu’elle partagera avec l’Italie le triste record d’être le seul pays à avoir baissé son parc de robots qui passerait de 33 600 à 30200 soit une baisse de 10%. Un record peu flatteur.
Faut-il lier ceci au fait que 74% de Français estiment que la robotisation entraîne une destruction d’emplois ?
$ 600 millions pour PéGé
C’est le montant que P&G (Procter and Gamble) va investir dans une nouvelle usine en West Virginia, la seconde depuis 44 ans aux Etats-Unis. Sur plus de 10 hectares, P&G veut installer une usine du futur capable de produire une très large gamme de produits sous des marques différentes. Elle emploiera 700 personnes, essentiellement via des entreprises sous-traitantes. Pour importante qu’elle paraisse, cette opération n’est que la partie émergée d’un iceberg, puisqu’elle se fait dans le cadre d’un plan de restructuration de $10 milliards que P&G avait décidé d’investir en 2012. Sur ces 10 milliards, pas moins de 6 milliards devaient être investis dans la Supply Chain. C’est ainsi que 40 entrepôts régionaux laisseront la place à 6 méga-centres de distribution. Le dernier, celui de Daytona s’étendra sur plus de 150 000 m² et, fin 2015, emploiera (toujours via des via sous-traitants) près de 800 personnes. Et c’est au centre de ces 6 centres de distribution que l’usine de Martinsburg (WV) va fabriquer une grande partie de la gamme de P&G. Avec cette nouvelle organisation, 80% des clients de la côte Est des Etats-Unis pourront être desservis sous 24 heures.
Il est rare, que des entreprises puissent repenser et reconstruire aussi fondamentalement leur chaîne logistique, mais avec un chiffre d’affaire de $83 milliards, une marge brute de 40 et un bénéfice de 11 milliards nul doute que P&G pouvait s’en donner les moyens.
250 000 Une autre SC pour les villes moyennes ?
Alors qu’il y a quelques mois c’étaient les mégavilles – au PIB supérieur à $250 milliards – qui étaient célébrées dans la presse spécialisée, (37 dont 16 en Chine) c’est maintenant au tour des villes d’au moins 250 000 habitants que la Supply Chain commence à s’intéresser et, ceci, toujours en Chine. En effet, au nombre de 90 en 2010, elles devraient passer à 280 en 2020. A cette même date il y en aurait 60 aux Etats Unis, un chiffre qui lui est légèrement en baisse, et une dizaine en France. Selon George STALK, EVP du Boston Consulting Group, l’inventeur du concept de « time-based competition », nous allons faire face à une Supply Chain à deux vitesses : une pour les régions en forte croissance, comme la Chine, où il faudra s’adapter continuellement et l’autre pour les « vieilles » régions comme la vieille Europe et les vieux Etats Unis (oh ! shocking, dirait Double U) pays dans lesquels des modèles comme celui de P&G pourront avoir un sens.
Après une segmentation par produit, par marché et par région, allons-nous aussi vers une segmentation par taille de ville. A bientôt un SCM pour les communautés de communes ?
18% Quand la Chine court après ses coûts logistiques
C’est un chiffre bien dérangeant quand on sait tous les efforts qu’elle fait pour maintenir ses coûts de production au plus bas. En effet selon le MIT Center for Transportation and Logistics, les coûts de transport à l’intérieur de la Chine s’élèveraient à 18% du chiffre d’affaires, soit 25 à35% de plus qu’en Europe. En cause, les péages interurbains, l’augmentation des salaires de chauffeurs plus revendicatifs et l’inefficience des 3PL nationaux locaux très « siloïsés ». L’arrivée de 3PL internationaux combinée à une dérèglementation naissante va-t-elle progressivement améliorer la situation ?
L’avenir nous le dira, mais nul doute que ce sera encore pendant longtemps un élément à prendre en compte dans le bilan de la délocalisation en Chine.
0,5% Quand l’emploi décroche de la productivité
Pendant près de 50 ans, aux Etats-Unis, la progression de l’emploi a suivi la même courbe que celle de la productivité, soit 2,1% par an, venant ainsi prouver ce que notre ex-ministre avait juste découvert, oubliant en passant qu’il aurait mieux fait de promouvoir la compétitivité de nos entreprises. Mais le sujet n’était pas à l’ordre du jour. Cette progression restait stable malgré les avancées technologiques et l’automatisation des processus. Mais, selon le Wall Street Journal, cette corrélation presque parfaite est maintenant remise en cause. En effet, alors que la productivité continue à s’améliorer de 2,1%, la progression de l’emploi n’est plus que 0,5%. La cause ? Des robots de plus en plus perfectionnés occupent de plus en plus de postes qualifiés et réduisent le nombre d’offres d’emploi pour des humains.
Même s’ils sont encore relativement peu nombreux, moins de 1% des salariés, l’augmentation de la capabilité des robots est telle que nous ne pouvons plus les ignorer.